Les riders? C’est une tribu un peu étrange, adepte de chevauchées sauvages ou de figures périlleuses, qui a le sens de la fête,
et qui finit par ne plus savoir si elle vit pour skier ou si elle skie pour vivre.
On les appelle riders. Qu’ils soient adeptes de chevauchées sauvages dans les grands espaces (les freeriders) ou de figures acrobatiques (les freestylers). Comme toute société, plus ou moins organisée, celle desridersa ses règles, son mode de fonctionnement, ses héros et son langage. Unriderpeut vous parler, avec des étoiles dans les yeux, d’un « fackie to fackie 360° boardslide ». Leridera aussi son uniforme, son code vestimentaire. A ce niveau, leriderde base a l’embarras du choix. Sur le marché, il y a une bonne cinquantaine de marques, y comprise celle créée par unridercommeGuerlain Chicherit**.
**Tout le monde s’habille « tendance » en mettant bien en evidence les logos des marques à la mode « underground ». On affirme sa différence en épousant une autre normalité, celle de la panoplie du freestyler branché, légitimé, authentifié.(jean Nerva)
L’ esprit partageur
Leriderest un animal étrange. On l’imagine solitaire. Leridervit volontiers en bande, qui se déplace de contest en contest. C’est un nomade, qui a le sens de la fraternité. Ils ont beau « se tirer la bourre », « envoyer du gros », comme ils disent, ils savent respecter, et même savourer la victoire de l’adversaire. L’important dans la compétition est de se faire plaisir et de partager ce plaisir.
C’est ce qui incite certains pros à créer leur propre évènement, histoire de faire découvrir à la grande tribu international son spot préféré. Ce fut le cas en avril 2003, àla Clusaz**, pour le__« Candide Thovex Invitational »__**. L’évènement s’est terminé dans un flot de ragga jamaïcain. Leriderest à la fois sportif et jouisseur. Il a le sens de la fête, et enfiler les nuits blanches n’est pas pour lui déplaire.
**J’ai invité mes copains canadiens et japonais notamment, pour qu’ils découvrent mon jardin à moi. Ici, c’est le plus beau snowpark naturel que je conaisse.(Candide Thovex)
Anthony Grumbley, dit__« Gamby", un Australien un peu « déjanté », a lui aussi l’esprit partageur. Il a créé, àVal d’Isère, le"Big day out »**. A sa troisième édition, l’évènement a attiré plus de 7000 spectateurs. Les meilleurs spécialistes mondiaux du freestyle avaient répondu présent à l’appel. Il y a eu aussi beaucoup de musique, de bière et d’alcool ( ), « carburants » indispensables à tout contest. Plus modeste, mais tout aussi prisé par le public, est le"Mix And Fly"__organisé parPascal Péguy**, toujours àVal d’Isère**. Là, pas ou peu, de vedettes. La compétition est ouverte à tous les « sauteurs » de la station qui se mesurent sur trois bosses, en nocturne, avec une sono et des effets de lumière particulièrement efficaces.
Du rififi
Tous les week-ends d’hiver sont donc consacrés à ces rassemblements aux quatres coins du monde:Verbier Ride(Suisse),Flaine Fabulous Tournament(France), etc. Ils sont en général organisés sous forme de circuits grâce aux principales marques de planches et d’accessoires, qui se trouvent être aussi les premiers sponsors desriders**:Burton, Rip Curl, Salomon, etc**. Mais, à côté des tournées de démonstration, les stations accueillent désormais des épreuvent officielles, dûment estampilléesF.I.S.(FédérationInternationale deSki). L’intrusion de ce petit monde policé et règlementé dans l’univers desridersest assez mal vécue par ces derniers. Il y a, depuis peu, du rififi dans l’air. lesriderscontestent en effet, de plus en plus, le rôle de la fédération, même s’ils admettent que l’admission du snowboardauxJeux Olympiquesait pu être profitable à leur discipline.
Mais à cette « reconaissance » des instances officielles du ski, ils préfèrent un autre circuit baptiséTTR(TicketToRide), qu’ils ont eux-mêmes mis sur pied avec le soutien des fabricants. En d’autres termes, is veulent rester maître du jeu et conserver à leur discipline son caractère ludique et fun.
**Le TTR se veut une alternative aux systèmes existants: son objectif est que, par son biais, les riders puissent donner à la pratique du snowboard l’orientation qu’ils souhaitent.(Drew Stevenson)
En haut de l’affiche
Ils font rêver. Cesridersqui sont en haut de l’affiche:Candide Thovex, Anak Gavaggio, Guerlain Chicherit, Xavier De Le Rue**, et quelques autres. Leurs salaires sont estimés dans une fourchette entre100 000et200 000euros annuels. En échange, ils passent le plus clair de leur temps en compétition et en service pour leurs sponsors: salons, démonstrations, photos et films publicitaires. Et ils doivent chaque année renégocier leurs contrat car, derrière eux, ça pousse. Aujourd’hui les 12-14 ans arrivent en force, et bousculent sans ménagement les vieux de 25 ans.
**La chasse aux sponsors est en fait une affaire de séduction. Dans ce sport il n’y a pas de hiérarchie claire, puisqu’il n’y a pas le verdict du chronomètre. Ce sont donc les ados qui désignent leurs vedettes avec leurs critères de séduction à eux. Et à ce jeu, un Candide Thovex, 21 ans au compteur, joue pour l’instant gagnant.(Gilles Chappaz)
**Vu de l’extérieur, ce milieu paraît fun, cool. Mais si tu ne fais pas le boulot correctement, tu es éjecté très vite.
(Enak Gavaggio)
Clochard des neiges
Pour une trentaine deridersbien payés dans le monde, plusieurs centaines survivent, sans penser au lendemain, grâce à des petits contrats de fabricants de planches, de vêtements, ou de lunettes. Les histoires de ces cigales se ressembles toutes. Démarrage laborieux ou flamboyant sur les contests, où l’on prend le maximum de risques pour se faire remarquer et capter l’objectif d’un photographe… Avec quelques parutions en poche, notreriderpeut espérer accrocher un ou deux sponsors, seule condition pour survivre.
Quelques uns mènent une vie de ski bum (clochards des neiges), squattant des chalets inhabités sur un couloir d’avalanche, installant leurs caravanes à deux pas des pistes. Dépensant le moins possible pour vivre avant tout leur passion sans « faire la pute ». Ce n’est pas toujours du goût des édiles locaux. Dans la vallée deChamonix**,Jimmy Peresson**, 29 ans depuis la dernière chute de neige, ex-membre du teamRossignol**, vit en caravane depuis 10 ans mais ne se considère pas comme un « ski bum ». Il a trouvé un compromis avec la commune d’Argentière, qui l’a autorisé à occuper un bout de terrain.
La tribu réconciliée
Opposer freeriders et freestyler n’est plus de saison. tous se retrouvent dans ce qu’on appelle le freestyle backcoutry, loin des snowparks, en pleine nature. A coup de pelletées, on construit un stade éphémère, le kicker de ses exploits, dans une neige fraîche, partagée entre seuls potes.
Edité par Girl of Snow: Titre tagué et modifié…